En chaque adulte réside l’enfant qu’il a été. Un petit garçon ou une petite fille avec son histoire, ses joies, ses souvenirs, ses blessures et des parts de soi qui demandent encore et toujours à être rassurées, aimées, sécurisées, réparées. Ce sont ces mêmes parts qui sont réactivées dans la vie de l’adulte au contact de personnes ou de situations qui viennent faire écho à ce vécu de l’enfance. Nous parlons ici de l’enfant intérieur : cette part enfantine, en nous, qui va réagir émotionnellement et instinctivement.

Par exemple :

L’adulte qui rencontre l’Autre et en attend réparation, sécurité et nomme cela amour quand il s’agit d’attachement et de dépendance.

L’adulte qui est traversé par des colères intenses lorsque l’enfant en lui n’a pas été entendu dans un moment d’injustice ou dans la satisfaction de ses besoins. Cet adulte pourra parfois se surprendre lui-même par l’intensité de sa colère (ou même de sa violence) au vu de la situation en apparence insignifiante. Tel autre adulte sera plongé dans une tristesse profonde par la réaction d’un ami, d’un proche, d’un conjoint avec la conscience d’une émotion en apparence démesurée vis-à-vis de la situation elle-même. Il en va de même pour la peur ou la culpabilité que peuvent éprouver les adultes parce que l’enfant en eux n’a pas connu suffisamment de sécurité, n’a pas été (ou ne s’est pas senti) désiré ni vraiment aimé.              

Ces réactions révèlent que ce n’est pas tant l’adulte, que l’enfant en lui, qui réagit. Un petit garçon, une petite fille aux prises avec ses manques et ses blessures. Si dans l’enfance, ce sont bien les adultes en qui il portait confiance et amour qui avaient la responsabilité de lui apporter suffisamment d’amour et de sécurité pour répondre à ses besoins (les parents essentiellement, qui vont avoir un rôle majeur dans la relation d’attachement qui les lie à leur enfant), c’est aujourd’hui l’adulte que cet enfant est devenu, et lui seul, qui peut répondre à ses besoins et réparer ce qui doit l’être.

Si nous regardons cela au travers du couple, ce sont deux adultes qui se rencontrent, chacun portant en lui son propre enfant intérieur. Voilà qui donne un autre éclairage à la relation, aux attentes de chacun ainsi qu’aux éventuels conflits : 2 adultes, 2 enfants intérieurs et autant de risques d’incompréhensions ou d’attentes et d’apports qui ne se rencontrent pas toujours. Qui entre en scène, qui est réactivé lors d’une dispute de couple? Si l’adulte, dans sa posture adulte, peut être en mesure de répondre de manière relationnelle à un désaccord, un conflit, la part enfant en lui ne saura répondre que de manière réactionnelle comme l’agressivité ou la fuite, par exemple.

Pour renouer avec l’enfant en soi, il va s’agir d’observer nos réactions d’adulte et commencer peut-être par s’interroger : qui est triste, qui est en colère, qui a peur, qui se sent coupable en nous à tel instant, face à telle personne, dans telle situation ? L’adulte d’aujourd’hui ? ou l’enfant blessé, traumatisé, négligé, en soi ? C’est bien souvent de lui qu’il s’agit.

C’est alors que l’adulte que nous sommes aura à entendre les besoins et les blessures de cet enfant en lui : les entendre pour les reconnaitre, leur faire une place et prendre en charge les besoins et blessures qui auront à l’être afin de rassurer, réparer cet enfant en soi et lui apporter tout l’amour dont il a besoin, un peu comme un parent aimant et sécurisant, bienveillant et à l’écoute, pourrait le faire.

Il peut être surprenant, lorsque l’on commence à s’y intéresser, d’observer combien ce petit enfant en soi est présent dans nos relations : il peut s’exprimer par une colère dominante (voire de la violence), une obéissance excessive (voire de la soumission), une opposition vive et systématique, une volonté de manipuler pour maintenir une emprise sur l’Autre... L’on peut même parfois se surprendre à l’entendre s'exprimer lorsque l’adulte adopte une petite voix enfantine pour parler à son père, sa mère ou son conjoint, comme l’aurait fait l’enfant en lui.

Devenir un adulte serein et libre, capable de relations et d’émotions apaisées suppose, je le crois, de  s’occuper de cet enfant en soi et de l’aimer d’un amour aussi fort qu’inconditionnel pour le libérer de ses conditionnements, de ses freins, et de ses blessures.